Tuesday, February 24, 2009

*Le Paris d'aujourd'hui ne s'est pas fait en un jour, par Thierry Coudert*

***Le président de la République a bien mesuré la dimension stratégique du Grand Paris, en confiant une mission à dix des plus grands architectes mondiaux : bâtir la ville de demain, jeter les bases d'un nouveau "vivre ensemble", donner à Paris les moyens de restaurer sa position internationale, érodée par des années de soins palliatifs administrés par Bertrand Delanoë, là où il fallait un sursaut. Hélas, l'actuel débat politique sur le sujet ne se situe pas au même niveau. Il voit s'affronter des montages juridico-administratifs complexes, des mécanismes de compensations financières inextricables, parsemés ici et là de quelques projets structurants, mais sans stratégie globale. A aucun moment on ne sent l'élan politique qu'avaient insufflé en leur temps Haussmann pour Paris, ou Delouvrier pour la région parisienne naissante.

Surtout, à une époque où l'exigence participative des citoyens est forte, rien n'est fait pour associer la population à un débat qui reste d'initiés. Comment mobiliser autour d'un syndicat mixte d'études, seule incarnation tangible du Grand Paris, quand déjà personne ne comprend à quoi sert le STIF (Syndicat des transports d'Ile-de-France), qui gère pourtant tous nos transports en commun ? Comment, dans ces conditions, ne pas être soupçonné de se livrer à des rapiéçages de territoires urbains, des stratégies électorales complexes, des maintiens d'avantages acquis ?

NOUVELLE FRONTIÈRE

La solution est pourtant simple. Elle a fait ses preuves depuis des siècles : il faut élargir le périmètre de la capitale, faire du périphérique le mur de Philippe Auguste de demain. Il y a urgence à mettre au coeur du débat actuel une nouvelle frontière, et les défis qu'elle suscite : ouvrir de nouveaux espaces à Paris, pour mieux répartir les fonctionnalités d'une ville moderne, pour développer une politique d'habitat mixte, des transports urbains adaptés, pour retrouver le dynamisme économique et culturel qui fut le sien et le dépasser.

Dès lors, bien des problèmes se résoudront : exiguïté du territoire, déséquilibre entre communes riches et pauvres, illisibilité des structures politiques et administratives... Souvenons-nous que Belleville, Auteuil, les Batignolles et tant d'autres villages d'il y a cent cinquante ans sont aujourd'hui des quartiers qui ont su garder leur personnalité tout en contribuant au développement et à l'équilibre de Paris.

A cela, il faut deux conditions. Primo, offrir la possibilité aux communes de la petite couronne d'intégrer Paris en recourant à un référendum communal systématique organisé sur la question du rattachement. Dans la majorité des cas, le résultat n'est guère douteux. Beaucoup de communes voient plus de 30 % de leur population changer d'un recensement à l'autre, et bien des banlieusards ne le sont que parce que le foncier est trop cher à Paris, qu'ils veulent un jardin, plus de qualité de vie.

Secundo, il faut décentraliser plus de compétences sur les maires d'arrondissement, avec bien sûr transfert des moyens correspondants. A l'Hôtel de Ville de Paris, les grandes politiques structurantes et de solidarité entre territoires ; aux maires d'arrondissement la gestion du quotidien. Ce serait finalement la même répartition que celle qui pourrait exister dans une intercommunalité classique, ce qui est de nature à rassurer les actuels élus de banlieue.

Un tel Paris élargi aura l'avantage de la simplicité de fonctionnement et de la lisibilité démocratique. A une époque où des quartiers d'activités économiques se développent de part et d'autre du périphérique et où s'étend le rayon d'action du préfet de police, tout conduit à poser la question du rattachement des communes voisines à la capitale. Ensuite seulement, il conviendra d'examiner les modalités d'association plus lâche des communes franciliennes de deuxième couronne. Entre-temps, on aura redonné un moteur au Grand Paris : un Paris élargi dans son territoire, revivifié par la démocratie de proximité des arrondissements anciens et nouveaux. Et surtout on aura remis au coeur de l'actuel débat le premier concerné : le citoyen.

Thierry Coudert est conseiller de Paris (UMP-Radical), président de la Diagonale.
Le Monde
25.02.09.

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