Tuesday, February 9, 2010

Seine-Saint-Denis : Bruno Beschizza, "gamin de Montreuil", policier et tête de liste UMP

***"Je ne serai pas le policier de service en Seine-Saint-Denis". Quadra carré et volubile, Bruno Beschizza, secrétaire général du syndicat de police Synergie officiers, a étrenné, samedi 6 février, son costume de tête de liste UMP aux régionales en Seine-Saint-Denis. Et s'est, d'emblée, refusé à être réduit à son identité professionnelle.

Très apprécié de Nicolas Sarkozy, le commandant de police est pourtant un novice en politique. Ce qui lui a valu d'être directement chaperonné par la tête de liste du parti majoritaire en Ile-de-France, Valérie Pécresse, lors d'un débat sur "l'égalité des chances", organisé à Montfermeil, une des communes les plus pauvres de France. Sa jeunesse dans le rôle ne l'empêche pas d'avoir une conscience claire des embûches à éviter. "Toute la difficulté de ma candidature, confiait-il en marge du débat, sera d'éviter qu'elle ne déclenche un procès de Sarkozy sur la sécurité." Mais de cela, le PS se charge déjà.

Sa candidature a été décidée dans le secret de l'été par Claude Guéant, le secrétaire général de l'Elysée. "J'ai connu M. Guéant en 1995, quand il était directeur général de la police nationale", confie M. Beschizza. L'enjeu premier était d'éviter que l'annonce de cet engagement aux régionales ne fragilise aux élections professionnelles le score de son syndicat jugé proche de M. Sarkozy. Son intronisation a donc été officialisée le 30 janvier, au lendemain même de la divulgation des scores.

Et ce parachutage de dernière minute a mis en colère le patron de la fédération UMP du département. Eric Raoult, député de la 12e circonscription de Seine-Saint-Denis et maire du Raincy, rêvait de conduire la liste. Mais son soutien à Roger Karoutchi lors des primaires internes à l'UMP pour la désignation de la tête de liste régionale lui a valu d'être écarté par Mme Pécresse. Depuis cette mise à l'écart, il ne cache pas ses doutes sur la pertinence du choix de M. Beschizza : "La Seine-Saint-Denis, il faut l'aimer ; pas vouloir la mater", confiait-il vendredi 5 février. "Est-ce judicieux de vouloir mettre l'accent sur les problèmes de sécurité, à propos des lycées notamment, alors que les gens savent bien que c'est l'Etat qui a la compétence du maintien de l'ordre ?", interroge M. Raoult.

Veste en tweed et gestuelle toute sarkozienne, M. Beschizza s'est présenté comme un enfant du "9-3" : "Mon père italien est arrivé en France en 1964. Il a obtenu une HLM en Seine-Saint-Denis. Je suis un gamin de Montreuil", a-t-il insisté, tentant de faire oublier sa casquette de "flic".

Ce qui n'a pas empêché le PS de lui faire porter le chapeau des "résultats dramatiques" aux yeux de la gauche, en matière de sécurité. "Avant, il manquait 400 fonctionnaires de police en Seine-Saint-Denis. Depuis la candidature de M. Beschizza, il n'en manque plus que 399", ironisait, samedi, Abdelhak Kachouri, tête de liste PS en Seine-Saint-Denis, de retour d'un tractage à Clichy-sous-Bois.

Le PS cible d'autant plus le syndicaliste policier que plusieurs de ses élus entendent faire de la sécurité un de leurs domaines de prédilection, en Seine-Saint-Denis. Ainsi, M. Kachouri, 33 ans, est maire adjoint chargé de la sécurité à Saint-Ouen et suppléant de Bruno Le Roux, député de la 1re circonscription de Seine-Saint-Denis, spécialiste, lui, des questions de sécurité au PS.

M. Kachouri a vu sa candidature soutenue par Claude Bartolone. Le patron (PS) du département prétend, lui aussi, mener une politique "sans tabou" sur le sujet au conseil général. "Je suis preneur d'un débat avec M. Beschizza", lançait même M. Kachouri.

Le jeune élu PS propose d'autant plus le défi qu'il se dit convaincu qu'en raison de ses galons d'officier de police et du "mauvais bilan du gouvernement", M. Beschizza "n'osera pas assumer un discours sur la sécurité" pendant la campagne.

Béatrice Jérôme
09.02.10
Le Monde

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