Wednesday, May 6, 2009

*Jean-François Bernardin : " Nous souhaitons une solution consensuelle avec la Chambre de commerce de Paris "*

***Alors que le projet de loi réformant les chambres de commerce est désormais attendu pour le début de l'automne, le président de leur organisation nationale, l'ACFCI, qui est également à la tête de la CCI de Versailles Val d'Oise Yvelines, revient sur l'opposition que continue à susciter le document-cadre de la réforme adopté par le réseau le 14 avril dernier. Une cinquantaine de " petites " chambres emmenées par celle d'Alès craignent de disparaître dans le nouveau paysage consulaire et ont suscité la rédaction d'un contre projet de réforme qui fera l'objet d'une proposition de loi déposée par le député UMP du Gard, Max Roustan. A l'opposé, la puissante chambre de commerce de Paris, juge que le processus ne va pas assez loin et souhaite, en Ile de France, une intégration plus poussée de la chambre régionale et des structures départementales qui subsistent en Grande Couronne.

Président de l'ACFCI vous êtes aussi à la tête de la Chambre de commerce de Versailles Val d'Oise Yvelines, comment avec vous perçu les annonces de Nicolas Sarkozy sur le Grand Paris ?

Il y a une véritable ambition qui dépasse tous les clivages politiques et les querelles de pouvoir des différentes structures. Le Président a précisé que le Grand Paris n'est ni Paris, ni Paris et la Petite Couronne et qu'il dépasse la Grande Couronne avec le port du Havre et le Canal Seine-Nord. Cela recoupe la conception de la plupart des présidents de chambres de commerce pour lesquels la vie économique déborde toute circonscription administrative. Ensuite, il a annoncé 35 milliards d'investissements sur dix ans dans les transports publics. Je pense qu'effectivement la relance doit se faire par les investissements. Je trouve donc que tout cela est extraordinairement cohérent. Seul bémol, le Val d'Oise apparaît à nouveau comme le parent pauvre. Aucune des nouvelles infrastructures de transport en commun n'y passe et, en termes de zones de développement, on nous parle de Roissy et d'un million d'arbres à planter à Gonesse. Cela ne suffira pas à développer le Val d'Oise! Quand à Cergy, on n'évoque que l'université et seulement pour les métiers de l'environnement et la logistique. Il est vrai que, depuis très longtemps, les élus du Val d'Oise n'ont pas présenté de projet fort de développement. C'est la raison pour laquelle je plaide pour que l'opération de transfert des réserves des musées nationaux et de développement économique qui doit l'accompagner se fasse sur le site de Cergy qui est de très loin le plus adapté. Nous sommes prêts avec les collectivités locales à développer autour du musée une zone industrielle de 170 hectares ouverte à tous les métiers qui y sont liés. C'est une bonne occasion pour le Président de la République de donner au Val d'Oise le projet spectaculaire qui lui manque aujourd'hui.

Le fait que le Président considère qu'on peut lancer un plan de cette envergure sans prévoir une gouvernance spéciale pour l'Ile de France peut il être transposé à la réforme des chambres de commerce alors que celle de Paris réclame, justement, un statut spécial?

Dans cette affaire, je suis la même logique que le président de la République. Pour moi, les choses sont extrêmement simples. Les pouvoirs publics nous ont demandé de nous réformer en laissant clairement entendre qu'ils le feraient eux-mêmes si nous ne le faisions pas. Nous avons eu sept mois de concertation et de décisions successives, de votes en assemblées générales qui ont réuni une très large majorité. Même si certains additionnent les votes contre et les abstentions, faire voter par 60% des chambres une réforme qui bouscule, par 98 voix contre 59, c'est déjà éloquent. Si elle avait été votée à l'unanimité cela aurait signifié que nous n'aurions rien réformé du tout! Nous avons rempli notre contrat, nous avons présenté un document très complet au gouvernement et nous attendons qu'il fasse passer, comme il s'y est engagé, les textes législatifs et réglementaires pour que cette réforme s'applique.

Nous avons du mal à comprendre la décision de la CCIP qui avait suivi, nous semble -t-il, y compris dans les délibérations, tout le mouvement. De plus, Paris n'a jamais indiqué ce qu'il souhaitait inclure dans un éventuel statut particulier. Depuis le début, les chambres de la Grande Couronne ont proposé de mutualiser au maximum les moyens et l'élaboration des politiques tout en préservant une proximité départementale indispensable pour notre légitimité, tant vis à vis des élus locaux, notamment des conseils généraux, qui continuent à exister, que des chefs d'entreprise. On peut imaginer, en Ile de France et nous avions donné notre accord, une application particulièrement régionaliste de cette réforme. Nous continuons à penser que c'est possible et je veux croire que le bon sens finira par reprendre le dessus.

Cette initiative de la CCIP dont les moyens sont très importants, ne vise-t-elle pas à terme, en associant l'image de Paris à celle de la France, à lui permettre de prendre la tête du réseau?

La réforme vise à renforcer la tête de réseau. Tout le monde est d'accord et Paris ne s'y est jamais opposé. Pour des raisons historiques, Paris a joué ce rôle pendant un siècle, ce n'est plus le cas depuis quarante ans et jamais l'ensemble des chambres de commerce n'acceptera que Paris le reprenne en tant que tel mais, bien sûr, Paris a toute sa place dans ce réseau et elle est considérable. Il n'y a pas une organisation nationale dans laquelle la structure parisienne, à elle seule, prétende représenter l'ensemble. Au contraire, le 25 septembre dernier la CCIP a même proposé de transférer certains de ses services d'études et juridiques à l'ACFCI.

La question est de savoir si nous sommes capables d'une vraie mutation intellectuelle. Nous avons proposé à la CCIP de fusionner toutes nos chambres et de recréer le même jour des structures légères départementales pour assurer la proximité mais en laissant à la future chambre de la région Paris Ile de France l'essentiel des moyens matériels, des patrimoines ainsi que la définition et la gestion des politiques lourdes, y compris la formation.

C'est la création d'un être nouveau, ce qui me semble beaucoup plus facile que de partir de structures existantes dont chacun voit bien, en réalité, qu'elles vont fonctionner en rivalité.

Je ne pense plus chambre de Versailles! Je ne me bats pas pour préserver un actif comme l'a indiqué le président de la CCIP. Les chambres ne sont pas des monuments historiques, elles n'ont de sens que si elles n'ont pas de finalité propre et ont pour seul but de servir les entreprises en s'adaptant au monde moderne.

Depuis deux décennies, la CCIP a fait un effort pour se rapprocher du terrain mais nos chambres de Grande Couronne en sont plus proches. Nous avons un taux de vote double de ce qu'il est à Paris. Quand l'argument soulevé par la CCIP selon laquelle le but de la réforme est de réduire le nombre d'établissements publics, il est irrecevable. Cela n'a jamais été un but. Nous avons souhaité que les plus petites chambres dépassent un seuil critique mais un établissement public, en lui même, ne coûte rien. Tout dépend de ce qu'on y met. Comme vous le savez, le taux de pression fiscale de la CCIP est le double de celui de la Grande Couronne.

Nous souhaitons qu'une solution consensuelle soit trouvée mais ce ne sera pas l'extension du statut actuel de Paris à la Grande Couronne. Ni les textes nationaux, ni surtout la logique de notre réforme n'y conduisent. Il faut trouver l'équilibre entre le territoire et la région. En Ile de France, nous sommes prêts à aller très loin dans la logique régionale mais nous n'abandonnerons jamais notre légitimité territoriale.

Comment a réagi le reste du réseau face à la position de la CCIP?

Dans l'ensemble, c'est l'incompréhension qui domine.

Et face aux opposants à la réforme qui ne semblent pas désarmer?

Je ne commenterai pas leurs dernières initiatives si ce n'est pour rappeler que ne pas voter la réforme, c'était s'en remettre à la discrétion du gouvernement et de l'administration dont nous ne connaissons pas le projet mais on peut imaginer qu'il aurait beaucoup moins de chances d'être conforme aux besoins de nos entreprises et de nos territoires que celui que nous avons élaboré.

PROPOS RECUEILLIS PAR DOMINIQUE MALÉCOT,
Les Echos
05/05/09

No comments: