***Selon une enquête de l’Amif (Association des Maires d’Ile-de-France), à laquelle ont répondu 247 maires sur 1281 maires franciliens, soit un peu moins de 20%, les maires se sentent exclus du débat sur le Grand Paris :
Ils sont en première ligne, pourtant personne ne leur demande leur avis. Les maires franciliens en ont assez. Ils se sentent très majoritairement exclus du débat sur le Grand Paris : 79 % d’entre eux estiment que leur voix "n’est pas suffisamment entendue". C’est l’un des enseignements de l’enquête menée par l’Association des maires d’Ile-de-France (Amif), que publie aujourd’hui le JDD.
Seulement 4% des édiles pensent que leur opinion est prise en compte, 3% en grande couronne (17% n’ont pas d’avis). "Les craintes des maires sont réelles sur la construction du Grand Paris, un sujet qu’ils savent nécessaire et inéluctable. Beaucoup ont l’impression que le débat est en train de leur échapper", analyse un responsable de l’Amif. Le président Claude Pernes (Nouveau Centre), maire de Rosny-sous-Bois (93) et conseiller régional, précise : "Ils sont les premiers concernés et ont besoin d’en savoir plus sur les intentions de l’Etat. Je préconise à Christian Blanc [Nouveau Centre également] de ne pas oublier de les consulter."
Depuis sa nomination il y a un mois, le nouveau secrétaire d’Etat chargé du développement de la région capitale rencontre un à un les "grands élus" d’Ile-de-France : le maire PS de Paris Bertrand Delanoë (cette semaine), le président PS de région Jean-Paul Huchon ou des ministres UMP franciliens, tels Roger Karoutchi ou Yves Jégo (lundi). Les "petits" maires se rappellent donc à son bon souvenir à travers cette enquête, qui lui sera remise. Quel type de gouvernance souhaitent-ils à la tête du futur Grand Paris ? Une majorité des édiles (64%) imagine un "conseil élu" au suffrage universel, surtout parmi les édiles de grande couronne (67%, contre 32% dans la petite couronne). Nombreux sont ceux qui ne se sont pas encore fait une religion sur la question de la gouvernance : 22% répondent "autre" (64% en petite couronne). En revanche, seuls 13% considèrent que le président du conseil régional pourrait prendre les commandes du Grand Paris et... 2% se prononcent en faveur du maire de la capitale (0% en petite couronne).
52% contre la suppression des départements limitrophes
Dans son récent rapport parlementaire, le sénateur de Seine-Saint-Denis Philippe Dallier préconise la fusion des quatre départements centraux (75, 92, 93 et 94). Une solution rejetée, semble-t-il, par les maires : 52% se disent hostiles à la suppression de ces départements. Dans les trois départements concernés (92, 93, 94), l’opposition paraît encore plus nette : 82% (contre 14% favorables). Autre interrogation : les limites géographiques du Grand Paris. Les avis sont partagés : 25% se prononcent pour une frontière incluant "Paris et les 123 communes de la petite couronne" (41% des maires des 92, 93 et 94) ; 21% optent pour "Paris et les 29 communes limitrophes" ; 15% se prononcent pour "un périmètre à ’géographie variable’ en fonction des enjeux" (27% des maires de la petite couronne) ; 14% répondent "toute l’Ile-de-France" ; et 5% retiennent l’idée de Manuel Valls (PS) : "Paris et toutes les communes situées jusqu’aux villes nouvelles incluses".
Quelles compétences pour le Grand Paris ? Sans surprise, les maires classent les transports (66%) et le logement (39%) en tête, suivis du développement économique, de l’emploi, de l’environnement et de la sécurité. La question de la fiscalité -et de la répartition équitable des ressources- est moins évidente : 56% des édiles (contre 44%) estiment que ces prérogatives devraient être confiées à la nouvelle structure ; 50-50 en petite couronne. L’enquête de l’Amif ne montre pas les réticences bien connues des communes aisées (92) à créer un "pot commun" avec les villes pauvres (93).
Divergences entre grande et petite couronne
Une question technique révèle un clivage important entre les maires de la petite et de la grande couronne : "Quelle structure ’Grand Paris’ serait, selon vous, la plus représentative du bassin de vie, d’emploi et d’habitat des Franciliens ?" 31% des élus des 77, 78, 91 et 95 (contre 0% des élus des 92, 93 et 94) évoquent une "communauté urbaine sur le modèle des grandes métropoles régionales comme Lille, Lyon, Marseille", projet défendu par Yves Jégo. Les maires de la petite couronne préféreraient une structure non encore définie, ou alors un "syndicat mixte ouvert" préconisé par Roger Karoutchi.
Les maires de la grande couronne, eux, sont plus nombreux à pencher pour la conservation du "système actuel" (25%) -ce qui ne serait pas pour déplaire à Jean-Paul Huchon-, ou pour la création d’une "nouvelle collectivité territoriale qui se substituerait aux départements de la petite couronne" (25%), ce que propose Philippe Dallier. Quant aux "systèmes d’intercommunalités géantes autour de Paris", c’est-à-dire la "marguerite" suggérée par Patrick Braouezec, président de Plaine commune (PCF), l’idée ne séduit que 6% des élus. Enfin, les maires franciliens se mettent d’accord (83%) pour dire que l’Amif "devrait jouer un plus grand rôle" dans la réflexion sur le Grand Paris. Histoire de mieux se faire entendre.
*L’Amif a envoyé un questionnaire aux 1281 communes de la région ; 247 maires ont répondu (19,3%), dont 29 en petite couronne (23,6%) et 218 en grande couronne (18,8%). Enquête réalisée du 14 au 22 avril 2008.
Article paru dans Le Journal du Dimanche
Par Bertrand GRECO
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