Thursday, March 27, 2008

***Une Union pour la Méditerranée : Pourquoi faire et comment ?***UNESCO


Mare nostrum, « berceau de la civilisation », « espace de paix et de coopération » : le discours sur la Méditerranée est le plus souvent lyrique et convenu. La réalité est plus terne que les proclamations de foi. Le bassin méditerranéen est divisé entre une rive stable, prospère et démocratique, et une rive qui n’est rien de tout cela. Il est parcouru par des courants migratoires massifs et anarchiques, rendus inévitables par un différentiel économique énorme et un formidable déséquilibre démographique. Et il est travaillé par un intégrisme religieux agressif, qui s’alimente aux sources du despotisme, de systèmes éducatifs déficients et de la misère.

Or, tout le monde comprend, et depuis longtemps, que ces disparités sont grosses de malheurs. La solidarité entre les deux mondes méditerranéens n’est pas seulement un commandement moral ; c’est la condition d’un avenir acceptable pour tous. Pour ne prendre qu’un exemple, mais combien significatif : l’Europe a désespérément besoin de main d’œuvre, les pays du Sud sont incapables de donner du travail à une jeunesse pléthorique et désœuvrée, que la frustration rend perméable aux mots d’ordre des fanatiques.

Mais comment maîtriser le nécessaire flux migratoire sans un minimum de formation, sur place, que seule une coopération internationale serait en mesure d’assurer ?

Bref, la géographie et l’histoire ont créé l’écrin d’une civilisation commune ; les impératifs de la mondialisation imposent les cadres d’un développement partagé.

C’est bien ce constat de bon sens qui avait conduit naguère à la mise en place du Processus de Barcelone. Comme on sait, cela n’a pas été un franc succès. Avec le recul, on voit bien pourquoi.

Amorcé en pleine euphorie du processus d’Oslo, alors que l’on croyait gagnée la bataille de la paix au Proche-Orient, il lui a fallu se déployer dans une atmosphère de conflit exacerbé par la deuxième Intifada. Trop ambitieux dans ses objectifs, visant à embrasser la totalité des aspects d’une relation infiniment complexe, il s’est perdu dans le gouffre des inégalités entre Nord et Sud, les deux s’enfermant dans une relation déséquilibrée qui interdisait tout véritable partenariat. Enfin, trop large dans son extension géographique, il a cherché à impliquer d’emblée l’ensemble des pays de l’Union européenne, riverains de la Méditerranée comme États éloignés du théâtre méditerranéen et naturellement tournés vers une Europe orientale qui s’impatientait déjà aux portes de l’Union.

Il faut donc changer de méthode, en tirant les leçons de l’échec (relatif) de Barcelone et en prenant appui sur ses acquis. Il faudra sans doute mieux délimiter les aires géographiques d’action ; mettre en place des partenariats véritables, en tenant compte des intérêts et traditions des partenaires, et impliquer davantage les sociétés civiles ; définir avec plus de rigueur des objectifs précis, à court terme, avec obligation de résultats.

Pourquoi ne prendrait-on pas pour modèle la « méthode communautaire » qui a si bien réussi à l’Europe aux premiers pas de son propre processus d’unification ?

Ainsi, intelligemment conçue et mise en chantier avec l’audace et la prudence nécessaires, l’Union de la Méditerranée, dont l’idée a été lancée par le Président de la République dans son discours du 6 mai 2007, est le grand chantier dont l’espace méditerranéen a besoin.

Le Forum de Paris est le cadre naturel d’une large réflexion sur ce projet, les conditions de sa réussite, ses contours et ses contenus. Travaillant depuis une décennie sur les relations Nord-Sud et ayant acquis une expertise reconnue dans l’organisation d’événements impliquant les acteurs sociaux du dialogue méditerranéen – décideurs politiques, chefs d’entreprise, syndicalistes, intellectuels, journalistes -, le Forum veut mettre son savoir-faire, fruit d’une expérience déjà ancienne, ainsi qu’un remarquable réseau d’amis, au service d’une idée qui constitue depuis sa naissance sa propre raison d’être.

Paris - UNESCO, 28, 29 et 30 mars 2008


*A demain...!

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