Friday, December 4, 2009

***Fillon tente d’apaiser le débat sur l’identité nationale...***

***Pour la deuxième fois en moins de deux semaines, François Fillon est appelé à jouer le rôle de fusible ou de démineur de Nicolas Sarkozy. Le premier ministre a dû remplacer, vendredi 4 décembre, le chef de l'Etat pour livrer devant l'Institut Montaigne sa vision de l'identité nationale, au moment où le débat revient comme un boomerang dans les rangs de la majorité.

François Fillon, qui a longuement préparé son discours avec son collaborateur le plus proche Igor Mitrofanoff, justifie le débat lancé par Eric Besson le 2 novembre. Pour lui, cet exercice collectif n'est "ni de droite ni de gauche", ni "un débat de circonstance".

Il entre dans "l'entreprise de modernisation" menée par son gouvernement depuis deux ans. Celle-ci ne se résume pas "à des réformes de structures", mais, selon lui, à la volonté des Français de s'inscrire dans "un destin collectif" pour permettre "à la France de tenir son rang dans la mondialisation".

"Diluer notre identité pour mieux nous intégrer dans le monde relève d'une illusion naïve", affirme-t-il. Le chef du gouvernement estime que la France "n'est pas une fiction sans traits ni visages". "Nous ne pouvons pas accueillir, intégrer ces milliers d'étrangers qui reçoivent chaque année la nationalité française en leur disant “Bienvenue nulle part”".

François Fillon rejette les critiques "d'instrumentalisation" de la question nationale. Il défend la nécessite du débat sur l'identité pour "resserrer le pacte national" et ne pas laisser les "tenants du repli national" monopoliser le débat. "La question de l'identité nationale est aussi vieille que la France et aussi plurielle que les Français".Pour lui, le débat est légitime car, "l'identité nationale, c'est une construction vivante", qu'il faut "entretenir" et "prendre le risque de nous parler, de nous écouter, de faire des choix et de marquer des préférences".

Pour François Fillon, le "temps des nations n'est pas révolu", c'est "une protection" et "un tremplin". "C'est bien du sentiment national que procèdent notre solidarité, notre conviction républicaine, notre confiance dans le progrès, notre estime de nous-mêmes".

Alors que le débat s'est engagé sur un terrain glissant depuis le référendum suisse sur les minarets, le premier ministre cherche l'apaisement en exaltant le vivre "ensemble", "la fierté d'être français" qui, selon lui, "conditionne tous les jours la pérennité de notre modèle politique et la solidité de notre pacte".

"IL NE FAUT PAS TOUT CONFONDRE"

Abordant la question des minarets, François Fillon reconnaît que le référendum suisse "suscite des débats". Sur le fond, il réaffirme le principe de laïcité tout en revendiquant "un vieil héritage chrétienqui ne saurait être ignoré par les autres religions installées plus récemment sur notre sol". Pour le chef du gouvernement, "il est normal et légitime que les pratiquants puissent exercer leur foi dans des conditions dignes". Mais, explique-t-il, les minarets "doivent nécessairement s'inscrire de façon raisonnable et harmonieuse dans leur environnement urbain et social". François Fillon recadre le débat : "Ce qui doit être combattu, c'est l'intégrisme mais surtout pas les musulmans. Il ne faut pas tout confondre".

Le "démineur" de Nicolas Sarkozy affirme ne pas craindre les polémiques suscitées par le débat sur l'identité nationale. "Etre français, c'est courir le risque que toute décision enflamme la controverse", ironise-t-il.Le premier ministre avoue s'exprimer non pas en premier ministre mais en "citoyen", animé, plaide-t-il, par sa passion de la France, "une affaire charnelle".

Le débat sur l'identité nationale ouvert par le chef de l'Etat à quatre mois des élections régionales pour recoller avec l'électorat d'extrême droite, et, si possible, gêner la gauche, divise de plus en plus la majorité.Certains responsables estiment que l'opération a libéré une pensée xénophobe.

Lien de causalité ? Le premier ministre jusqu'alors épargné dans les sondages dévisse, à l'unisson de Nicolas Sarkozy. Selon le baromètre TNS-Sofres pour Le Figaro Magazine de samedi 5 décembre, le couple exécutif perd respectivement trois points (Nicolas Sarkozy à 34 %, François Fillon à 36 %).

Malgré sa défection, Nicolas Sarkozy n'a pas l'intention, selon son entourage, de renoncer à s'interposer dans le débat. "Son absence à l'Institut Montaigne n'est pas un désengagement de sa part", affirme l'Elysée qui souligne qu'il a déjà livré sa vision à La Chapelle-en-Vercors, le 12novembre.

Il pourrait intervenir dans les prochains jours sur la question des minarets.

Sophie Landrin et Laetitia Van Eeckhout
Le Monde
05.12.09

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